mercredi 20 février 2008

Aux Feuillantines

Mes deux frères et moi, nous étions tout enfants.
Notre mère disait : « Jouez, mais je défends
Qu'on marche dans les fleurs et qu'on monte aux échelles. »

Abel était l'aîné, j'étais le plus petit.
Nous mangions notre pain de si bon appétit,
Que les femmes riaient quand nous passions près d'elles.

Nous montions pour jouer au grenier du couvent.
Et là, tout en jouant, nous regardions souvent
Sur le haut d'une armoire, un livre inaccessible.

Nous grimpâmes un jour jusqu'à ce livre noir ;
Je ne sais pas comment nous fîmes pour l'avoir,
Mais je me souviens bien que c'était une Bible.

Ce vieux livre sentait une odeur d'encensoir.
Nous allâmes ravis dans un coin nous asseoir.
Des estampes partout ! quel bonheur ! quel délire !

Nous l'ouvrîmes alors tout grand sur nos genoux,
Et, dès le premier mot, il nous parut si doux,
Qu'oubliant de jouer, nous nous mîmes à lire.

Nous lûmes tous les trois ainsi tout le matin,
Joseph, Ruth et Booz, le bon Samaritain,
Et, toujours plus charmés, le soir nous le relûmes.

Tels des enfants, s'ils ont pris un oiseau des cieux,
S'appellent en riant et s'étonnent, joyeux,
De sentir dans leur main la douceur de ses plumes.

Les contemplations, Livre V « En marche », X, 185

Ce n'est pas du tout un bon poème de Victor Hugo.
J'aime le début, la première strophe, en raison de la référence à l'enfance.
Je note qu'Eugène est zappé. mmmm... On sait que Victor dévore sa famille. Pas sympa avec Eugène.
Il y a peu d'adjectifs, et ils ne sont pas terribles, pas très imagés.
On imagine bien l'intérêt que des enfants peuvent éprouver pour les histoires de la Bible, à une époque où les malheureux n'ont pas Pokémon et Bob l'éponge. ça, OK. La comparaison de la fin avec l'oiseau des cieux est nunuche, le nunuche de Victor Hugo, qui a un nunuche bien à lui.
Alors, que reste-t-il?

Le seul élément valable de ce poème, c'est l'évocation de l'enfance : les enfants jouent, on devient qu'ils ont désobéi à leur mère (on l'espère, mais moi j'aurais peur si les miens montaient aux échelles...), ils trouvent un truc, grimpent sur l'échelle, le ramènent par terre...
Donc, le mouvement et le courte scène évoquée n'échappent pas au talent de Victor Hugo.
A part ça, les bons sentiments qu'on y lit, c'est probablement tout ce que l'on déteste chez lui.

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